Blog de Rawa-Marie Pichetto
Écriture spontanée, sans fioritures...

Ce blog est un récit.
Le récit de "personnages en quête d'auteur", comme dirait Pirandello...
Il s'agit de passer l'énergie sous forme de mots et d'images avec toute la difficile alchimie du Verbe et de ses diverses articulations.
Alchimie que l'on trouve au théâtre.
Les planches m'ont appris ce mystère incroyable que l'on trouve dans les mots. Ces mots qui nous touchent, nous caressent, nous procurent du plaisir. Les mots qui parviennent à notre peau, sensuellement parfois. Et nous n'en sortons pas indemnes.
J'emprunte à tout ce monde de la scène - théâtre, cirque, danse, théâtre dansé, ... - sa magie, afin qu'il en tombe par-ci et par-là...


En contrepartie du "chapeau" de ce blog (la citation de Paul Valéry), je pense à ce poème de Charles Baudelaire dans les Fleurs du Mal :

'Correspondances'
La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles ;
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
Il est des parfums frais comme des chairs d'enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
- Et d'autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l'expansion des choses infinies,
Comme l'ambre, le musc, le benjoin et l'encens,
Qui chantent les transports de l'esprit et des sens.

dimanche 12 mars 2017

A Bernard,
le compagnon passant, une fraternité sans fin 

Oui ! ça fait un bail que je ne t'ai pas écrit ni pensé à toi dans le même esprit avec lequel je pensais à toi juste après ta mort. Je ne pouvais plus.
Le hasard des choses a fait qu'aujourd'hui j'ai relu 3 ou 4 échanges de courriels de l'année dernière, quelques mois avant ta maladie.
J'ai retrouvé ton esprit immédiatement. C'est très fort cette magie.
J'ai retrouvé tes moqueries gentilles lorsque je te demandais éternellement des conseils, et te confiais mes problèmes. Tu me disais intelligemment beaucoup de choses. Avec cet esprit vif et percutant que tu avais.

Je ne pouvais plus penser à toi comme ça car ça me faisait mal. Ton absence a pris le dessus sur tout. J'ai plongé profondément dans le choc de ta mort, un choc qui est survenu bien après. J'ai réalisé à quel point tu n'étais plus là...
Je me suis anesthésiée physiquement et psychologiquement durant ces derniers mois pour tenir le coup, pour pouvoir dormir. Car j'avais perdu le sommeil après ta mort. J'avais peur de tout, souffrant également de phénomènes physiques douloureux qui se sont focalisés sur mon cœur. Mon cœur ne battait plus comme avant. Et c'est pas au sens figuré, mais réel.
Mon cœur me disait qu'il n'en pouvait plus ; il est devenu anarchique.

J'ai souvent pensé à toi et à ton cœur qui s'est arrêté. Souvent pensé à cet instant que tu as vécu. C'est la première fois que je réalise ce que c'est un cœur... J'ai beaucoup pensé à toi.

Lorsque je lis tes mots, cela me donne de l'oxygène. Oxygène qui me manque. L'oxygène de la pensée, de la parole intelligente ; l'oxygène de la voix, de la communication.

Je ne peux pas parler de toi autour de moi. Personne de ceux qui t'ont aimé et bien connu n'est à mes côtés pour partager une parole bienveillante à ton égard.

Je suis obligée de garder tout pour moi ; te parler "en secret" sur un blog public... Je suis consciente de cet acte de parole ouverte et un peu dérobée.
Mais depuis ta mort, je n'ai pu faire de deuil. Même ta mort m'a été interdite.

Je fais semblant depuis. Je fais semblant dans ma vie privée et sociale. Une mort est passée par là, mais touuuut vaaa bien ! Je souris, je ris, je suis active, etc.
Les gens me font comprendre indirectement qu'il ne faut surtout pas parler de choses qui fâchent. Il faut, soit aller voir un psy et prendre des cachets pour "être bien", soit rester dans son coin. Mais surtout pas montrer que nous vivons un deuil ! Oh là là ! Tu comprends, le culte du bonheur !

Sauf qu'un deuil c'est une confrontation directe avec la mort. Cette absence éternelle, ce silence assourdissant. Le vide.

Je ne peux pas facilement parler de toi non plus, car plus aucune légitimité réelle n'était restée entre nous. Puisque la période avant ton décès a été entourée d'une folie relationnelle dont j'ai payé les frais les plus chers.
Pour la première fois de toute ma vie j'ai été insultée publiquement (pour l'instant je ne te dis pas où...).
Etc. etc. Que dis-je ? Je n'ai la preuve de rien, à part être témoin d'une courbe affective complètement irrationnelle !
Les mots nous tuent comme ils peuvent nous sauver. Sur ce coup-ci, ils étaient mal utilisés et mal interprétés. J'ai tenté le recours à la raison, c'était trop tard.

Je te laisse un peu maintenant. Je reviendrais peut-être te parler de la France et la période des élections présidentielles, mais il faut que j'arrête d'abord d'en "vomir" pour pouvoir en parler.
Tu es mieux là où tu es sans doute! Nous sommes dans la merde.

-- Oh tiens, avant de quitter :  j'ai pensé à toi en écoutant ce morceau de Dave Brubeck : Take Five :)



A ciao et fraternité :)






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